En principe, lorsqu’il fixe une peine, le juge pénal doit tenir compte des condamnations prononcées par les juridictions pénales d’autres États membres de l’Union européenne. Toutefois, il ne doit pas le faire lorsque les faits dont il est saisi constituent, avec les infractions ayant déjà fait l’objet d’une condamnation, la manifestation successive et continue d’une même intention délictueuse. Le régime prévoit une différence de traitement entre les personnes qui ont déjà été condamnées en Belgique et celles qui l’ont été dans un autre État membre de l’UE. La Cour constitutionnelle ne voit là rien de contraire à la Constitution.
Lorsqu’une condamnation est passée en force de chose jugée et que les faits constituent la manifestation successive et continue de la même intention délictueuse, le juge doit, au moment de fixer la peine, tenir compte de la condamnation prononcée, mais uniquement pour les personnes qui ont été condamnées en Belgique, et non pour celles qui l’ont été dans un autre pays de l’UE. C’est ce qui ressort de la lecture conjointe des articles 65 et 99bis C. pén.
La Cour constitutionnelle dit qu’il appartient au législateur de déterminer le régime de fixation de la peine. Il dispose pour ce faire d’une grande liberté, pour autant qu’il tienne compte du droit européen.
Or, que dit ce
droit européen ? Il n’exige pas que le régime de fixation de la peine s’applique pleinement aux personnes qui ont déjà été condamnées dans un autre État membre de l’UE. Il demande toutefois que cette condamnation soit prise en compte d’une autre manière.
La Cour constate que la différence de traitement repose sur un critère objectif : les différences existant entre les régimes répressifs européens. En excluant le régime de fixation de la peine en cas de même intention délictueuse dans le chef d’une personne déjà condamnée antérieurement dans l’UE, le législateur a voulu éviter que, dans certains cas, le juge belge ne puisse plus prononcer de peine.
L’exclusion n’empêche toutefois pas le juge de tenir compte d’une autre manière de la condamnation prononcée dans un autre État membre de l’Union européenne. Le juge belge conserve sa liberté d’appréciation pour fixer la peine qu’il estime appropriée et justifiée eu égard aux circonstances. Il peut en réduire le degré s’il estime qu’en infligeant une sanction d’un certain degré, dans les limites du droit national, il ferait preuve d’une sévérité disproportionnée à l’encontre du délinquant, eu égard à ses circonstances, et si la finalité de la peine peut être atteinte par une sanction d’un degré moindre. Il en a la faculté si cette réduction du degré de la peine eût été également possible dans des affaires strictement nationales.
La Cour conclut dès lors que le législateur peut décider de ne pas rendre applicable le régime de fixation de la peine selon l’art. 65 C. pén. à des condamnations prononcées dans d’autres pays de l’UE. Ce faisant, il ne viole pas le principe d’égalité.
Source :
- C.C. 16 janvier 2020,
n° 8/2020 - C.C. 16 janvier 2020,
n° 6/2020 Voir aussi :
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Code pénal (art. 65 en 99)
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Décision-Cadre n° 2008/675/JAI du Conseil du 24 juillet 2008 relative à la prise en compte des décisions de condamnation entre les États membres de l'Union européenne à l'occasion d'une nouvelle procédure pénale